Archive d’étiquettes pour : secret des affaires

[column width= »1/1″ last= »true » title= » » title_type= »single » animation= »none » implicit= »true »]

La loi n°2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires, et son décret d’application n°2018-1126 du 11 décembre 2018, ont transposé la Directive (UE) 2016/943 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicite.

Près de 5 ans après la transposition de ce dispositif en droit français, il est intéressant de revenir sur sa mise en œuvre effective.

Par un arrêt du 10 juin 2021, la Cour de cassation est venue préciser le contrôle de proportionnalité exercé par le juge en matière du secret des affaires.

Avant d’évoquer les modalités du contrôle de proportionnalité (3), il importe de rappeler la définition du secret des affaires (1), préciser le régime de responsabilité de l’article L.151-1 du Code de commerce (2), et enfin exposer brièvement les moyens de protection du secret des affaires dès lors que le différend est porté devant le Tribunal (4).

1 – Rappel de la définition du secret des affaires

Aux termes de l’article L.151-1 du Code de commerce, est protégée au titre du secret des affaires toute information qui :

– Revêt « une valeur commerciale, effective ou potentielle » pour son détenteur,
– Fait l’objet de la part de son détenteur légitime « de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret »,
– N’est pas « dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ».

Toutefois, il convient de préciser que si la jurisprudence ne requiert pas le caractère « brevetable » des informations et/ou du savoir-faire relevant du secret des affaires , lesdits informations et/ou savoir-faire ne doivent pas être tombés dans le domaine public. (Cour d’appel de Chambéry, 3 novembre 2020, n°20/00550 ; Cour d’appel de Versailles, ,10 février 2022, n° 20/03403)

2 – Précisions sur le régime de responsabilité

Les articles L. 151-1 et suivants du Code de commerce, mettent en jeu le régime de la responsabilité civile délictuelle de son auteur et non celui du régime de la responsabilité contractuelle.

En ce sens, la Cour d’appel de Chambéry, par un arrêt du 3 novembre 2020 est venue rappeler que « la réservation des savoir-faire met en jeu les mécanismes de responsabilité civile ».

3 – Le contrôle de proportionnalité

« Si le secret des affaires ne constitue pas en lui-même un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du Code de procédure civile, c’est à la condition que le juge constate que les mesures qu’il ordonne procèdent d’un motif légitime, sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées, et ne portent pas une atteinte disproportionnée aux droits de l’autre partie au regard de l’objectif poursuivi » . (2ème chambre civile, Cour de cassation, 10 juin 2021, n°20-11.987)

C’est dans ces termes que l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 10 juin 2021 vient préciser l’articulation entre l’article 145 du Code de procédure civile relatif à l’administration de la preuve et l’article L.151-1 du Code de commerce relatif à la protection du secret des affaires.

Article 145 Code de procédure civile :

« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».

Article L.151-1 Code de commerce :

« Est protégée au titre du secret des affaires toute information répondant aux critères suivants:
1° Elle n’est pas, en elle-même ou dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ;
2° Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ;
3° Elle fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret ».

En effet, si les mesures d’instruction peuvent être légalement ordonnées dès lors qu’il existe un motif légitime, ce n’est que sous réserve d’un contrôle de proportionnalité de celles-ci au regard des atteintes pouvant être portées au secret des affaires.

Plus récemment, par un arrêt du 14 janvier 2022, le premier Président de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, saisi au visa de l’article 514-3 du Code de procédure civile d’une demande d’arrêt de l’exécution provisoire de l’ordonnance de référé ayant prononcé notamment « l’interdiction d’utiliser, divulguer, produire, offrir, mettre sur le marché » le produit comportant les informations relevant du secret des affaires a fait ordonné « l’arrêt de l’exécution provisoire de la décision déférée». (Cour d’appel d’Aix en Provence, 14 janvier 2022, N°21/00672)

En l’espèce, bien que le caractère secret de la formule du produit, dont l’appréciation est laissée aux juges du fond, ne soit pas contesté, les mesures provisoires susdites prises dans l’attente d’une décision au fond ont été jugées disproportionnées notamment compte tenu du préjudice financier potentiel d’une telle interdiction et les capacités d’indemnisation limitées, compte tenu du plan de redressement en cours, de la société détentrice du produit couvert par le secret des affaires.

La Cour rappelle l’importance du contrôle de proportionnalité en matière des mesures d’instruction et des mesures de protection du secret des affaires.

4 – Les moyens de protection du secret des affaires devant les juridictions

Aux termes de l’article R152-1 du Code de commerce : « Lorsqu’elle est saisie aux fins de prévenir une atteinte imminente ou faire cesser une atteinte illicite à un secret des affaires, la juridiction peut prescrire, sur requête ou en référé, toute mesure provisoire et conservatoire proportionnée ».

Il est à noter que dans le cas où le juge statue en référé, il n’est pas fondé à examiner si l’information faisant objet du litige relève ou non du secret des affaires au sens de l’article L.151-1 du Code de commerce ; cet examen relève de la compétence des juges du fond. (Articles 872 et 873 du Code de procédure civile)

En effet, afin de minimiser les risques, il est possible, dans le cadre de la procédure de référé, de demander à ce que les informations relevant du secret des affaires soient occultées, c’est en ce sens que la Cour d’appel de Paris a statué dans un arrêt du 8 avril 2021 opposant une société à la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes) (Cour d’appel de Paris, Pôle 1, 2ème chambre, 8 avril 2021, N°21/05090) :

« S’il n’est plus possible d’interdire au Ministre de se dessaisir de l’assignation et des pièces telles qu’il les a déjà adressées à la société AgeCore, il sera cependant invité à adresser à la société AgeCore une version de l’assignation conforme à la version expurgée (…) et les pièces « caviardées » aux fins de permettre à cette société de disposer d’une version ne contrevenant pas à la protection du secret des affaires étant rappelé que ces mesures ne sont que préventives dans l’attente de ce que, dans le cadre de l’instance devant (…) le tribunal de commerce de Paris, il soit organisé sous l’égide du juge un cercle de confidentialité et qu’il soit statué pièce par pièce sur les atteintes qu’elles portent et les modalités de leurs productions ».

Cette mesure provisoire préventive s’appliquera en attendant la mise en place d’un « cercle de confidentialité » par le juge du fond, ce qui permettra en effet de limiter l’accès aux pièces litigieuses à certaines personnes.

Dans cette affaire, la Cour met en échec les dispositions de l’article L.151-7 du Code de commerce, aux termes duquel le secret des affaires « n’est pas opposable lorsque (…) la divulgation est requise (…) dans l’exercice des pouvoirs d’enquête, de contrôle, d’autorisation ou de sanction des autorités juridictionnelles ou administratives ». En l’occurrence, il s’agissait du Ministre de l’Economie, des finances et de la relance, représenté par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi.

En définitive, les exemples de la mise en place du dispositif de protection du « secret des affaires » soulèvent des difficultés pratiques, notamment quant à l’équilibre entre les droits de la défense, l’administration de la preuve, et la préservation du caractère confidentiel des informations. Néanmoins, les dispositions légales offrent des moyens de protection du secret des affaires efficaces dès lors que les parties ont pris le soin de conclure une convention de confidentialité et font état d’une documentation technique et financière exhaustive.

Articlé rédigé par Maître Corinne PILLET et Madame Angélina SOLOMKO

[/column]

[column width= »1/1″ last= »true » title= » » title_type= »single » animation= »none » implicit= »true »]

Le POC (proof of concept) est la réalisation concrète apportant la démonstration de la faisabilité d’une idée ou d’une méthode et ce, préalablement au processus de développement.

L’importance du POC justifie la négociation d’un contrat comportant notamment les clauses suivantes:

  • Une attention particulière doit être portée à l’objet et au périmètre de la solution à valider pour l’entreprise cliente ainsi qu’au calendrier de l’intervention. Bien qu’au stade du POC, il semble que seule une obligation de moyens puisse être mise à la charge de la startup en ce qui concerne le résultat du POC, une obligation de moyen renforcée peut être demandée quant au respect des délais.
  • Sur le plan financier, la rémunération et les modalités de paiement de la startup, mais également les moyens mis à disposition par l’entreprise pour la mise en œuvre du POC doivent être précisés.
  • L’ensemble des données et des résultats du POC sont transférés au client mais le savoir-faire, les solutions, les recherches restent la propriété de la startup. Afin de délimiter les droits de propriété intellectuelle, les parties peuvent désormais utiliser la notion de secret des affaires (dont le décret n 2018-1126 a été publié le 11.12.2018) pour identifier les données protégées par le secret des affaires et celles qui, au contraire, peuvent être divulguées dans le public. A ce titre, en l’absence d’usage établi en la matière, il est envisageable de fixer à une durée de 2 ans l’obligation de confidentialité liant les parties.En effet, stratégiquement, le client préservera le secret des résultats du POC tant que le service ou le produit n’aura pas été lancé sur le marché.
  • Pour autant, la startup aura intérêt à obtenir de son client le droit de communiquer à ses seuls conseils liés par le secret professionnel ou à ses partenaires liés par l’obligation de confidentialité par une lettre d’intention, les données démontrant l’efficacité de la solution, car il s’agit d’un actif incorporel. Cet actif pourra être ainsi valorisé dans la perspective d’une levée de fonds ou de l’apport de cet actif au capital d’une société partenaire.
  • Enfin la startup une fois le service ou le produit commercialisé devra pouvoir citer dans ses références l’opération réalisée pour le client.

[/column]